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Notes sur l’Indochine

En 1952 et 1953, Claude Cheysson est conseiller du président du Gouvernement du Vietnam à Saigon. A ce titre, il adresse une série de note aux autorités françaises et vietnamiennes.

  • 10 juin 1952. Note de synthèse concernant les attributions en dehors de l’Indochine du Ministre chargé des relations avec les Etats associés. 10 pages.
  • 15 octobre 1952. Note adressée au Président du Gouvernement du Vietnam à propos du manque d’information de l’opinion publique française sur la situation en Indochine. 6 pages.
  • 3 novembre 1952. Note personnelle adressée au Président du Gouvernement du Vietnam pour préparer son voyage à Paris. 5 pages.
  • [15 documents à suivre…]

Introduction au livre jamais écrit

A partir du début des années 2000, Claude Cheysson envisage d’écrire un livre de mémoires. L’idée lui semble presque incongrue, il y réfléchit néanmoins. Beaucoup l’y poussent. Le journaliste James Burnet travaille longuement avec lui. Le livre ne verra jamais le jour. En 2002, néanmoins, Claude Cheysson rédige une introduction à ce livre jamais écrit.

Introduction au livre jamais - aperçu

L’économie algérienne peut-elle être développée ?

En 1957, Charles Frappart, André Valls et Claude Cheysson rédigent un dossier intitulé « Quelques données du problème algérien » destiné à certain nombre de personnalités, dont le Général de Gaulle. Le Monde en obtient copie et en a fait état un peu plus tard dans une pleine page (ce qui a ajouté au scandale et a valu à Claude Cheysson une sanction immédiate) :

Livre Papa

Quelques données du problème algérien

par Claude Cheysson

Vers la fin de 1956, Charles Frappart, André Valls et moi – qui nous étions liés au Viêt Nam en 54-55 – avons décidé de diffuser un « dossier » marquant objectivement que « l’intérêt bien compris de la France » ne comportait pas le « maintien à tout prix de la souveraineté de la France sue l’Algérie ». Ce dossier, « Quelques données du problème algérien », est daté de juin 1957 ; nous l’avons envoyé sous plis personnels à un certain nombre de personnalités, dont le Général de Gaulle. (Le Monde en a eu une copie par je ne sais quelle voie et en a fait état un peu plus tard dans une pleine page, ce qui a ajouté au scandale et m’a valu une sanction immédiate). À une date que je ne me rappelle pas, vers la fin de 1958, donc quelques mois après son retour au pouvoir, le Général de Gaulle a fait venir à l’Élysée un des auteurs, Frappart ou Valls, (j’étais en exil au fond de l’Afrique noire) et lui a dit très simplement : « bien sûr vous avez raison ».

En avril 1962, j’ai été convoqué par le Général, qui m’a reçu en tête à tête — seule fois de ma vie où je l’ai ainsi rencontré —. Cela a été bref : « Après ce que vous avez écrit sur l’Algérie, vous devez être bien avec ces gars là ! Alors, je vais vous nommer à la succession de Guichard, l’OCRS devant devenir, en application des Accords d’Évian, un Organisme franco-algérien, chargé de toutes les responsabilités pour le pétrole et les autres ressources du sous-sol saharien ». C’est ainsi que je suis devenu Directeur Général de « l’Organisme Saharien », qui, pendant plus de 4 ans, a sauvegardé une position française privilégiée dans ce domaine, tout en permettant aux Algériens d’apprendre le pétrole. Et notre action a été suivie directement, attentivement par l’Élysée.
L’intérêt porté personnellement par le Général à ce secteur, plus généralement à la mise en valeur des concessions arrachées aux Algériens au Sahara est illustré par une démarche très étrange dont j’ai été chargé auprès de Ben Bella, démarche qui n’a jamais été publiée : Peu avant mon départ pour Alger, en juillet 1962, Guichard à l’Élysée m’a donné pour instruction de voir Ben Bella, sans témoin, et de lui dire, de la part du Général personnellement, que « le jour où il estimerait que les dispositions des Accords d’Évian sur le pétrole étaient insupportables, il devrait le faire savoir directement et discrètement au Général » et que « celui-ci s’engageait personnellement à en proposer l’abrogation dans les trois mois ». Cette communication au Chef de l’Exécutif algérien devait, m’a dit et répété Guichard, rester strictement confidentielle ; personne n’en étant informé ni à Paris, ni à Alger. Étrange, mais bien intelligente manœuvre. Je suis convaincu qu’elle explique en partie le fait que les Algériens aient retardé de plusieurs années le rétablissement de leur pleine souveraineté sur leur principale ressource, les hydrocarbures. Manœuvre bien caractéristique, en tout cas, du Général ; et qui a bien servi les intérêts français en donnant quelques années à l’industrie pétrolière française pour se placer aussi ailleurs dans le monde.

Paris, janvier 2000

1957-06 - Cheysson - Quelques données du problème algérien

Opération « Mouette »

Lors de sa mission en Indochine en 1953, Claude Cheysson revient sans cesse sur la nécessité de repenser la présence française au Vietnam afin d’engager une rupture avec le passé et d’agir autrement et rapidement. Il enfonce le clou dans un document daté du 20 juin 1953 destiné à Paul Reynaud qui lui demande conseil ; c’est une vision prémonitoire qu’il expose : « que nous soyons obligés de continuer le combat, ou qu’il soit possible, un jour, de traiter avec le Vietminh, il convient tout d’abord de donner au Vietnam une indépendance éclatante »
écrit Claude Cheysson. Le mot tabou – indépendance – a été prononcé. Il précise qu’il faut « mener cette politique avec audace et énergie ». Cette dernière phrase reviendra, telle une loi d’airain de son action dans les fonctions qu’il occupera plus tard.

Les critiques à son égard deviennent particulièrement acerbes, surtout des milieux coloniaux tout occupés à leurs trafics en tout genre, lorsqu’il soutient la dévaluation de la piastre et l’établissement du contrôle des transferts de monnaie décidés par le Gouvernement de Nguyen Van Tam qui se trouve obligé, au final, de se séparer du jeune fonctionnaire. Pour couper court aux insultes, Claude Cheysson prend une décision incroyable qu’il qualifiera de « très épidermique ». Un coup de tête : « Je veux manifester mon désaccord, raconte-t-il, et je le fais de manière absurde en me faisant rappeler en activité. Je profite du fait qu’ayant été dans la division Leclerc, j’ai des relations auprès de l’état-major et, que par conséquent, on peut faire cette chose tout à fait surprenante qui est de rappeler un fonctionnaire français qui se trouve en activité à l’autre bout du monde. Je suis affecté à un groupe mobile et la chance veut que je sois envoyé dans une région particulièrement agitée. » À l’automne 1953, il participe à l’opération « Mouette » dans la région de Phu Nho Quam au sud du delta du fleuve Rouge, en plein territoire ennemi, afin de neutraliser les divisions Vietminh 304 et 320. C’est lors de ces combats que le capitaine Claude Cheysson se trouve en face du colonel Nguyen Co Thach, futur ministre des Affaires étrangères de la République socialiste du Vietnam. Trente ans plus tard, ceux, qui se combattaient se retrouvent à Hanoï, soit à quelques dizaines de kilomètres de leur champ de bataille, pour évoquer avec une réelle émotin ce passé et ainsi établir de véritables relations de confiance, et même une relation d’amitié. À la fin de sa vie, Claude Cheysson revenait souvent sur cet engagement. Il l’abordait aussi d’un autre point de vue. Nombre de ses camarades de la 2e DB avaient rempilé dans les guerres coloniales. Lui, y était farouchement opposé. Mais en même temps, il tenait en haute estime certains d’entre eux, et il ne voulait pas qu’ils pensent que ses prises de position sur l’indépendance du Vietnam fussent, en soi, une forme de lâcheté face à cette guerre. Il a donc repris du service brièvement pour apporter la preuve de sa fidélité. En fait les deux versions de ce retour vers les armes ne sont pas contradictoires.

Journal de campagne:

19 au 25 octobre 1953

19 au 25 octobre 1953

26 octobre au 1er juin 1953

26 octobre au 1er juin 1953

2 au 7 juin 1953

2 au 7 juin 1953